L’OIT présent les réalisations de la recommendation 193, un des plus importants instruments politiques pour les coopératives
13 juin 2016
L’organisation internationale du travail (OIT) a publié fin 2015 « L’histoire de la recommandation 193 sur la promotion des coopératives » (disponible en espagnol aujourd’hui). La recommandation a été négociée entre 2001 et 2002 et approuvée en juin 2002. l’OIT y décrit le processus d’élaboration de cet instrument politique international de référence, sa mise en œuvre et son impact.
La recommandation 193 de l’OIT sur la promotion des coopératives, adoptée à la Conférence internationale du travail par la majorité des états, des organisations patronales et des confédérations syndicales du monde entier, a fourni un cadre pratique et moderne pour le développement et la révision des politiques coopératives et des législations dans plus de 100 pays.
L’élaboration cette recommandation a exigé beaucoup d’efforts, de discussions et de consensus dans les différents pays impliqués. CICOPA a joué un rôle central dans cet effort pour arriver à un accord sur le texte au sein du mouvement coopératif et lors les négociations à Genève (voir l’article ci-joint de 2003 escrit par Bruno Roelants et publié en français dans la revue RECMA, section 3. Comme il est dit dans cet article une douzaine de représentants des organisations coopératives ont obtenu l’accréditation nécessaire à l’enregistrement au sein du comité de négociation de la Conférence internationale du travail comme les représentants des gouvernements, des organisations patronales ou des syndicats. Ils ont ainsi été répartis dans les trois composantes de l’OIT, au sein d’une Commission spécialisée sur les coopératives et se sont rencontrés officieusement chaque jour pour coordonner leurs actions. Ils ont également rencontré les autres parties prenantes (différents groupes gouvernementaux, d’employeurs et de syndicats) lors de réunions parallèles où des aspects essentiels du texte ont été négociés.
Entre les deux tours de négociations (juin 2001 et juin 2002) CICOPA a également joué un rôle important avec l’ACI-Amériques (aujourd’hui Coopératives des Amériques) pour parvenir à un accord sur le texte que le mouvement coopératif voulait. L’essentiel a été finalement approuvé en 2002 au cours du dernier tour des négociations.
La recommandation constitue une étape très importante pour le mouvement coopératif international. Un de ses aspects le plus significatif, comme l’explique Bruno Roelants, est que « pour la première fois depuis son origine au début du 19e siècle le concept de la coopérative a été reconnu entièrement, officiellement et sans équivoque au niveau mondial avec tous les paramètres nécessaires et suffisants acceptés (…). Dans le même temps avec cette recommandation les gouvernements, les syndicats et les entrepreneurs de la majorité des pays du monde ont explicitement identifié le besoin de politiques publiques spécifiques pour la promotion des coopératives ».
Autre aspect unique de cette recommandation : c’est la première fois aussi depuis l’établissement de l’OIT au début du 20e siècle qu’une organisation extérieure à l’organisation des Nation Unies – l’Alliance coopérative internationale en l’espèce – est mentionnée dans un de ses textes officiels. En effet, l’ACI est explicitement citée dans l’annexe où les sept principes coopératifs qui y sont définis sont entièrement extraits de sa déclaration sur l’identité coopérative (1995).
Indépendamment de ces sept principes coopératifs opérationnels le texte inclut également la définition de la coopérative et les dix valeurs coopératives telles que formulées dans la déclaration sur l’identité coopérative. Il s’agit là d’un précédent important pour empêcher que d’autres acteurs socio-économiques n’essayent d’imposer leurs propres normes aux coopératives. Le texte reconnaît également que les coopératives sont des entreprises spécifiques qui exigent un traitement spécifique.
« Sur la base de cette analyse, les coopératives devraient non seulement tirer bénéfice d’un cadre de réglementation différencié mais devraient également être activement promues par des mesures spéciales (art. 5) » ajoute Bruno Roelants. « Le texte va jusque indiquer que ceci « devrait être considéré comme l’un des piliers du développement économique et social national et international (art. 7/1) ».
Le texte précise aussi que les gouvernements sont les principaux responsables de la promotion des coopératives : une des mesures demandées est que l’enseignement coopératif fasse partie de l’enseignement formel et régulier ce qui signifie, entre autre, d’inscrire les coopératives dans les programmes scolaires.
Mise en œuvre
Une fois adoptée, la promotion de la recommandation 193 a été principalement réalisée au niveau national par l’organisation de stages de formation technique et de séminaires se concentrant sur la politique coopérative et sur la loi. Il s‘agissait d’initiatives émanant des universités et des centres de recherches, d’organismes coopératifs nationaux et des gouvernements nationaux. En outre, dans quelques pays d’Asie-Pacifique et d’Afrique, les projets de coopération technique financés par les institutions donatrices visant au renforcement des coopératives et/ou à la création d’emplois par des coopératives ont utilisé la recommandation 193, parmi d’autres outils de formation, dans des activités de renforcement de capacité pour les représentants des coopératives et les responsables politiques.
À ce jour, la recommandation a prouvé sa pertinence par rapport aux pays dans les efforts de ceux-ci de fournir un solide environnement favorable aux entreprises coopératives. En Afrique, par exemple, l’Union africaine s’est référée à la recommandation 193 dans son travail sur la réduction de la pauvreté et le développement durable. À son sommet à Ouagadougou en 2004, l’Union africaine a explicitement mentionné le développement des coopératives comme une condition essentielle pour la réduction de la pauvreté et le développement durable.
Aujourd’hui, le document continue d’être un outil fonctionnel pour le développement de la législation et des politiques coopératives nationales. Quand les gouvernements et les mouvements coopératifs nationaux s’engagent dans une réforme législative coopérative, le texte et l’esprit de la recommandation continuent à guider le processus dans le monde entier ».
Historique
Le document explique non seulement ce qui s’est produit après que la recommandation ait été adoptée mais inclut également dans sa première partie l’histoire de la relation entre l’OIT et le mouvement coopératif. Un des faits intéressants rapporté est que le premier directeur du Bureau International du Travail, Albert Thomas, avait travaillé dans le mouvement coopératif français et qu’à l’heure de sa nomination il était membre du conseil d’administration de l’Alliance Coopérative Internationale.
Dès sa création en 1919, l’OIT a reconnu l’importance des coopératives comme un moyen de poursuivre son mandat de réaliser la justice sociale et le plein emploi. L’OIT reste la seule agence spécialisée des Nations Unies ayant un mandat explicite pour les coopératives. Au centre de ce mandat figure un système de normes internationales de travail qui favorisent les opportunités pour les femmes et les hommes d’obtenir un travail convenable et productif, dans des conditions de liberté, d’égalité, de sécurité et de dignité.